Décourageux
Ce fut un vrai poète : il n'avait pas de chant.
Mort, il aimait le jour et dédaigna de geindre.
Peintre : il aimait son art − Il oublia de peindre...
Il voyait trop − Et voir est un aveuglement.
− Songe−creux : bien profond il resta dans son rêve ;
Sans lui donner la forme en baudruche qui crève,
Sans ouvrir le bonhomme, et se chercher dedans.
− Pur héros de roman : il adorait la brune,
Sans voir s'elle était blonde... Il adorait la lune ;
Mais il n'aima jamais − Il n'avait pas le temps. −
− Chercheur infatigable : Ici−bas où l'on rame,
Il regardait ramer, du haut de sa grande âme,
Fatigué de pitié pour ceux qui ramaient bien...
Mineur de la pensée : il touchait son front blême,
Pour gratter un bouton ou gratter le problème
Qui travaillait là − Faire rien. −
− Il parlait : " Oui, la Muse est stérile ! elle est fille
D'amour, d'oisiveté, de prostitution ;
Ne la déformez pas en ventre de famille
Que couvre un étalon pour la production !
" O vous tous qui gâchez, maçons de la pensée !
Vous tous que son caprice a touchés en amants,
− Vanité, vanité − La folle nuit passée,
Vous l'affichez en charge aux yeux ronds des manant !
Décourageux 2